26 juin 2008 / Il est des événements qui marquent leur décennie mieux qu’un livre ou qu’un film. La Demolition Party, fête de désinauguration de l’Hôtel Royal Monceau, est de ceux-là.
Cette party mémorable est le point culminant de la stratégie mise en place par Alexandre Allard pour entrer dans le monde feutré de l’hôtellerie de luxe. Cet entrepreneur génial au regard d’enfant a réuni tous les éléments de l’ère du bling autour de la valorisation de son projet immobilier : le luxe d’un poussiéreux cinq étoiles Parisien, un architecte star, le monde de l’art et du rock, le tout-Baron et quelques célébrités. Tout ce qu’il faut pour faire le buzz en direction du très discret monde de la finance.
Après avoir fait fortune une première fois à trente ans en vendant en 2.0 sa société de bases de donnés comportementales, Alexandre fait ses premières armes dans l’immobilier aux côtés de son ami Thierry Gillier. Il constate que, contrairement aux autres grandes capitales mondiales, Paris possède des cinq étoiles vieillissants mais aucun Palace digne de recevoir ses alters-égo les nouveaux milliardaires quadragénaires qui atterrissent en jet au Bourget. Et ça, ça craint.
En 2007 il rachète le Royal Monceau, qui ressemble à cette époque plus à une paisible pension de famille qu’à un cinq étoiles. Son objectif est de le transformer en Palace résidentiel avec des suites aussi grandes qu’un terrain de tennis, un spa pharaonique, un bar digne d’un paquebot transatlantique et une boutique de
luxe où pourront patienter les femmes des nouveaux milliardaires en jeans et en baskets. Elles sont indispensables à l’équilibre des nouvelles Formules 1 du monde des affaires extrêmement sollicitées et capables de toutes les sorties de route.
Pour réaliser son projet Alexandre Allard fait appel à l’architecte, designer et décorateur mondain Philippe Stark qui a su lui aussi préserver son âme d’enfant et qui, dès la fin des années 80, a imposé les règles de la nouvelle hôtellerie en inventant le Royalton et le Paramount à New York, puis le Mondrian à Los Angeles.
Alexandre n’attend pas l’ouverture du Palace pour communiquer sur son nouveau jouet. Il annonce, d’un même coup médiatique la fin d’une époque et la naissance d’un nouvel ordre économique mondial. Il met en vente le vieux mobilier de l’hôtel lors d’enchères géantes organisées par le sémillant Maître Cornette de Saint Cyr, et installe à résidence pendant un mois vingt artistes contemporains dont Arne Quinze qui dessinera la boutique L’Eclaireur de la rue de Sévigné à Paris, l’artiste André fondateur du Baron et Jean Feldman, publicitaire ami de Jacques Séguéla. Loin de faire un caprice d’enfant Alexandre Allard montre sa toute puissance à l’aube d’un siècle à deux vitesses dirigé par l’argent roi de la finance. Ainsi démarre son épopée et sa conquête de l’industrie de l’hôtellerie de luxe.
Annoncée par quelques vidéos sur Dailymotion et Youtube,
l’information est reprise par la presse mondiale. La Demolition Party du 26 juin 2008 sera fastueuse, hallucinante, orgiesque. On y croise le Tout-Paris branché. La faune réunie est tellement incroyable que Jude Law, Sébastien Tellier, Guillaume Canet passent inaperçus au milieu de mille invités de tous les sexes abreuvés par des fontaines de champagne inépuisables.
C’est à coup de masses que les invités, en adoration devant le veau d’or, défoncent les vestiges de l’ancien monde. Toutes les œuvres présentes sont détruites ainsi que ce qu’il reste de mobilier, les miroirs, les salles de bain, les murs des chambres. Tout est détruit à l’occasion d’une grande fête barbare.
La crise financière de 2009 viendra dessaouler tout le monde ; et le 18 octobre 2010 Alexandre Allard ouvrira les portes de son Palace en toute discrétion, comme le veut la nouvelle décennie.
A l’Elysée le Président Sarkozy ne propose plus aux Français de travailler plus pour gagner plus et troque ses Ray Ban pour une moins grande visibilité dans les média.
Alexandre Allard est également administrateur de Balmain.